Sciences au lycée

Conférence "archéologie et géosciences"

Par GILLES BUCHONNET, publié le lundi 12 février 2024 08:40 - Mis à jour le lundi 12 février 2024 08:40
e__SEM-1_b_Image-2_11zon.jpg
RDV mercredi 31 janvier 2024, 18h, amphi du lycée. "Archéologie et géosciences. Pour écrire une nouvelle histoire des campagnes européennes. L’exemple des grands murs en pierre sèche des Pouilles (Italie)."

Depuis les années 1980, la connaissance de l’histoire des campagnes européennes a pris un nouvel élan grâce à la collaboration entre archéologues, géomorphologues, botanistes et zoologues. Ainsi, les fossés, les haies, les murs en pierre sèche, les champs, les prés et les forêts sont devenus des objets historiques, datables et caractérisables dans leur évolution, grâce à l’étude géomorphologique, archéobotanique, anthracologique et archéozoologique. Ces nouvelles approches permettent désormais d’écrire une histoire inédite de nos campagnes, bien au-delà des informations fournies par les textes. Ceux-ci sont toujours avares de renseignements à ce sujet et surtout ils sont rares voire absents avant le XVIIIe siècle et l’essor des administrations fiscales et cadastrales modernes.

Le potentiel de ces nouvelles approches se révèle, tout particulièrement, dans les régions où un substrat calcaire et des sols minces ont généré un épierrement massif dont les produits ont, bien souvent, servi à bâtir d’innombrables constructions, souvent imposantes, qu’il a toujours été plus économique de conserver que de supprimer, du moins jusqu’à la mécanisation agricole massive intervenue dans la seconde moitié du XXe siècle. En effet, une structure en pierre sèche est un corps ouvert, parcouru d’interstices qui piègent les artefacts abandonnés sur la crête du mur et les écofacts (fragments végétaux, pollens, animaux) dont certains ne sont pas biodégradables et peuvent être collectés, caractérisés et datés. Cela autorise une reconstitution du peuplement végétal du secteur et plus largement des évolutions climatiques et environnementales. De plus, les murs en pierre sèche fixent dans la trame parcellaire actuelle des formes anciennes désormais fossilisées qui nous parlent de régimes de propriété disparus (latifondo, petite propriété, etc.), de circonscriptions administratives du passé (seigneuries, diocèses, paroisses puis communes), de frontières culturelles et politiques.

À l’extrémité sud-orientale de la péninsule italienne, la région des Pouilles offre l’un des plus importants ensembles de constructions agraires en pierre sèche du monde. Certaines d’entre elles se présentent aujourd’hui comme des grands murs qui s’étendent sur plusieurs kilomètres. Au cours de cette soirée, seront présentés les enquêtes spécifiques qui sont en cours sur quelques-uns de ces aménagements et auxquelles participent régulièrement des étudiants de nos CPGE et de plusieurs universités françaises et italiennes. Entre histoire des sociétés, histoire naturelle et enjeux économiques et patrimoniaux, les étudiants découvrent ainsi des savoirs et des pratiques interdisciplinaires peu connus, s’ouvrant à une réflexion globale sur la longue histoire de l’interaction homme-environnement, tellement actuelle compte tenu des enjeux et des inquiétudes propres à notre époque.

Publications sélectionnées :

STRANIERI G., Les territoires locaux dans la Pouille méridionale (Italie) du VIIe au Xe siècle. Un reflet de la frontière de Byzance en Adriatique ? Actes du colloque Frontières spatiales, frontières sociales, 51e Congrès de la SHMESP (Société des Historiens Médiévistes de l’Enseignement Supérieur Public), Perpignan – Gérone 21-24 mai 2020, à distance en raison de l’épidémie de Covid-19, Éditions de la Sorbonne, Paris, 2021, p. 141-157.

STRANIERI G., Olive Cultivation and Olive Products in the Byzantine Southern Apulia (6th-11th centuries). IZDEBSKI A., MULRYAN M. (ed.), Environment and Society in the long Late Antiquity (Late Antique Archaeology Journal, vol. 11-1 – 2018), Brill, Leiden, 2019, p. 172-182.

STRANIERI G., Limites en pierre sèche et structure agraire en Pouille méridionale (VIe-XIIe s.). Les apports récents de l’archéologie des paysages agraires. Actes du Colloque international L’héritage byzantin en Italie. 4e – Habitat et structure agraire, éd. Jean-Marie Martin, Annick Peters-Custot, Vivien Prigent (2010), École française de Rome, Rome, 2017, p. 91-115.

__________________________________________________________________________________________

Giovanni Stranieri, Saint-Étienne (France)

Docteur en archéologie qualifié aux fonctions de maître de conférences et ancien agent du Service régional de l’archéologie de Lorraine, il enseigne l’archéologie et l’histoire médiévales en licence et en master à l’Université Jean Monnet Saint-Étienne.

Pour sa thèse de doctorat, il a étudié les transformations des paysages agraires dans la Pouille médiévale (Italie). Depuis plusieurs années, ses recherches portent sur les paysages agraires et l’organisation des espaces dans le Massif central, d’une part, et dans les Pouilles (Italie), d’autre part. À partir de 2023 il dirige un projet de recherche international sur les grandes constructions linéaires en pierre sèche des Pouilles.

Ancien boursier de l’École française de Rome, il est aujourd’hui chercheur associé de l’Unité mixte de recherche ArTeHiS (Archéologie, Terres, Histoire et Société, Université de Bourgogne, Dijon), intégré à l’axe de recherche « Fabrique du paysage. L’homme acteur et héritier de son environnement ».

gstranieri@gmail.com – giovanni.stranieri@univ-st-etienne.fr

https://artehis.u-bourgogne.fr/limes-et-ager-analyse-archeologique-des-constructions-lineaires-en-pierre-seche-campagne-2023/

Pièces jointes

À télécharger

 / 1